I
Né sur la terre des landes et des collines,
Au bord de la mer sauvage du nord,
Quand j’étais dans mon premier âge,
Le sang de mes veines était d’un rouge généreux.
Il bouillonnait à l’air de la côte ;
Mais maintenant mes joues sont décolorées ;
Hélas ! je vais par les pays,
Une fleur d’absinthe aux lèvres.
Mes ancêtres, vivants ou morts,
Étaient grandement honorés dans leur patrie…
Hélas ! et moi, sur le déclin de l’âge,
Je suis comme une herbe dans le pré.
Au-dessus de leur tête brillait le soleil,
Les regards du peuple vers eux se levaient.
Qui peut savoir si je suis bon ou mauvais ?
Je ne dépasse point le niveau des autres.
Les anciens savaient vivre
Sages et sans compromissions en ce monde ;
Ils cultivaient leur petit jardin ;
Et, parmi leurs fleurs, des saints grandissaient,
Mais les jardins sont abandonnés,
Les fleurs sont étouffées par les ronces ;
Dans le manoir sans toit ni porte
Vient hurler le vent de la mer.
La lumière va disparaître,
La Grande Nuit vient, épouvantable ;
La face rouge, comme le sang, le soleil pleure,
Avant de mourir, au bord de l’horizon.
Le cœur glacé et oppressé,
Dans le deuil et dans l’effroi,
Je marche sur les ruines,
Une fleur d’absinthe à la bouche.
Erwan Berthou - 1904
Démarré à la mi-mars, au moment des premières éclosions, perçu comme un retour aux sources, comme une ode à la nature. Cet ouvrage est un travail sur l’enfermement, l’ennui, comme une ballade poétique.
Impression Riso 20 couleurs sur papier Munken Print White 90gr et Munken Polar 240gr.
Série limitée de 500 exemplaires numérotés et signés - 96 pages.